Confidence confinée #7 – Aurélie Guillemin
Avril 2020

Je tiens à partager avec vous, les dernières confidences confinées de créateur.rice.s reçues. Les conséquences de cette crise se feront sentir dans la durée et il me semble important de transmettre ces témoignages. Aujourd’hui, je publie les réponses d’Aurélie Guillemin, bijoutière. J’ai recueilli ce témoignage en plein confinement, il date donc du mois d’avril. Installée dans une boutique au cœur d’Arles, Aurélie a dû gérer l’interdiction d’accéder à son local. Un grand déménagement a eu lieu pour qu’elle puisse continuer à travailler. Aurélie Guillemin a ensuite pu rouvrir sa boutique à partir du 11 mai et un nouveau déménagement dans un nouveau local aura bientôt lieu.

Suite au confinement, peux-tu me raconter l’impact concret sur ton activité ?

Suite à l’annonce du confinement par le gouvernement, je me suis immédiatement organisée afin de pouvoir continuer à travailler. Dans le centre ville d’Arles, comme partout ailleurs, les arrêtés préfectoraux nous ont très vite interdit d’ouvrir nos commerces au public,  de continuer à y travailler ou de s’y rendre. J’ai donc récupéré toute mes affaires, mes outils, mon atelier, mes bijoux et je me suis installée un petit coin d’atelier à la maison. Je n’ai pas à me plaindre, je suis presque mieux installée, j’ai de la place, de la lumière et même du soleil. Au départ, je crois que je ne prenais pas vraiment la mesure de ce qu’il se passait et de ce que cela impliquait. Je me suis vite rendue compte que finalement, tout serait paralysé : fournisseurs, sous-traitants, clients…

Comment envisages-tu les prochains mois ?

Pour le moment, je finalise quelques commandes que j’avais en cours avant les mesures prises par l’État mais l’entreprise tourne au ralenti. Après cela, je pense prendre du temps pour créer de nouveaux bijoux, une nouvelle collection.

Néanmoins, si la situation dure vraiment dans le temps, comme il semble que cela va se produire, je ne sais pas ce que je ferais de plus. J’espère naïvement que les aides d’état me permettront de tenir le coup mais j’ai peur qu’elles ne s’adressent surtout à des entreprises plus grandes que la mienne. Quand je pense à tous ces artisans d’arts, artisans tout court, commerçants… Il va y avoir de lourds dommages…

Qu’as-tu envie de dire à ta clientèle ? As-tu mené des actions pour rester en contact avec elle ?

Je continue à communiquer sur Instagram et Facebook, je partage un peu sur cette situation particulière. Mais pour les clients que je rencontre à la boutique, j’ai malheureusement très peu de moyens pour continuer à échanger avec eux si ce n’est par téléphone ou e-mail. Par ailleurs, alors même que nous sommes pour la plupart d’entre nous confinés dans nos maisons, j’aimerais que l’on n’oublie pas notre proximité. Nos échanges, nos partages et le fait de rencontrer un artisan et faire appel à lui pour un projet, c’est travailler cette proximité.

Comment te sens-tu ces derniers jours ?

Depuis le début du confinement, je suis complètement perdue et je passe par toutes les phases : résignation, patience, espoir, colère, peur, tristesse…

J’ai la conviction que cet évènement va tous profondément nous marquer. J’ai l’espoir que cela change certaines choses : nos façons de vivre, notre altruisme, le domaine social, notre planète, notre environnement proche.  Mais cela implique aussi de remettre en question ma façon de vivre et forcément mon travail. De quoi demain sera-t-il fait ?Les gens, mes clients, auront-ils encore envie/besoin de mon savoir-faire ? Dois-je songer à faire autre chose alors même que je reste toujours aussi passionnée par ce métier ? Est-ce que les projets à venir valent le coup d’être développés ? De quoi seront faits les prochains mois de reprise ?

D’une certaine façon, le fait de travailler à la maison sans plus avoir la pression du chiffre d’affaires et de payer les factures me ramène à l’essence même de ce qui me transcende dans mon métier. Je dois admettre que ça fait quand même du bien de prendre le temps, à nouveau. Cependant, tous les projets (je dois m’installer dans une nouvelle boutique dès le retour à la normale) sont figés et il faut être simplement patient et résigné.

Peux-tu continuer à travailler ?

Les premiers jours, je n’arrivais pas à travailler. J’avais besoin de faire tout autre chose afin de m’extraire complètement de ce faux nouveau quotidien, ce quotidien qui se voulait comme avant le confinement mais qui n’avait absolument rien à voir. Je faisais donc d’autres choses et cela me permettait de ne plus penser à la situation actuelle. Après quelques jours d’acclimatation, j’ai enfin pu me remettre à l’établi et travailler de nouveaux projets, continuer à faire un peu de stock. Et puis il y a toujours des choses à faire à coté comme le site internet, les photos… Mais c’est sur fond de « À quoi bon », puisqu’on avance malgré tout, mais dans l’incertitude.

Merci Aurélie.

Pour retrouver Aurélie Guillemin :

Site : aurelieguillemin.com
Facebook : www.facebook.com/aurelieguilleminbijoux
Instagram : @aurelie_guillemin_bijoux

Photo : © Aurélie Guillemin. Photographie fournie par Aurélie Guillemin et publiée avec son autorisation.